Dessins anciens

Fruit d’un long travail de recherche, le cabinet de dessins anciens reflète la volonté d’Abraham & Wolff de faire dialoguer les œuvres au-delà des périodes et des catégories traditionnelles. Il s’inscrit dans la continuité des expositions conduites par la Galerie Jocelyn Wolff dédiées à Eugène Carrière ou à l’art de la grisaille, ainsi que dans le prolongement de l’exposition consacrée à la figure de Roger Caillois et l’art de la peinture sur pierre présentée chez Abraham & Wolff.
Croisant les époques et les sensibilités, l’inventaire couvre une période allant du XVIᵉ au début du XXᵉ siècle, avec des dessins de Josef Kriehuber (1800-1876), Louis-François Cassas (1756-1827), Pierre Ozanne (1737-1813) ou Pierre Lélu (1741-1810). Une place importante est également accordée aux œuvres anonymes, dont une étude approfondie permet de préciser l’origine : leur siècle, leur aire géographique, ou encore l’entourage dans lequel évoluait l’artiste. Avec l’idée que la qualité ne repose pas nécessairement sur une attribution prestigieuse.
Le cabinet embrasse une grande diversité de styles et de sujets : paysages réels ou imaginaires, fantaisies, scènes inspirées de la mythologie gréco-romaine, portraits, scènes de genre, révélant la richesse et la continuité des pratiques du dessin à travers les siècles.

Après une formation d’ingénieur aux Ponts et Chaussées, puis un passage dans l’atelier de Jean-Jacques Lagrenée, Louis-François Cassas part avec le duc de Rohan-Chabot pour un voyage à Naples, puis en Istrie et en Dalmatie (actuelle Croatie). Vingt ans plus tard, il lui est demandé d’y retourner, afin de réaliser une centaine de planches gravées pour illustrer son périple, dans une région peu explorée à la fin du XVIIIe siècle. Notre dessin est semble-t-il la première pensée de la gravure du Victoria & Albert museum , qu’il aurait probablement réalisé à son retour à Rome de son premier voyage, en 1782. Quelques modifications ont été apportées entre temps : les figures qui animent le paysage, les voiles des embarcations, les arbres et arbustes qui occultent tels des coulisses, les différents degrés des eaux bouillonnantes de la cascade… Cette œuvre, en plus de nous offrir un sublime paysage aujourd’hui classé parc national, nous montre comment ce grand voyageur-paysagiste a su associer la topographie documentaire à la qualité artistique.

La datation de cette feuille est donnée par leur filigrane, la marque des papetiers hollandais Dirk et Cornelis Blauw, associés en 1750. Cornelis étant décédé en 1762, on peut donc dater les dessins entre 1750 et 1762. Les Pays-Bas ayant exporté leur papier dans l’Europe entière, le dessin n’est pas forcément d’une main hollandaise. Son auteur ne semble pas avoir assimilé les découvertes de Copernic, ni celles de Kepler. La lune, puis apparemment les planètes avec leurs satellites, semblent tourner autour d’une Terre qu’animent des petites figures humaines à côté d’une église. Les orbites sont clairement dessinées, autour de la Terre, puis autour de chaque planète. Des étoiles brillent dans le cosmos. Au sommet, le soleil envoie ses rayons, mais aussi les éclairs de la foudre. Un archange semble le commander, et des nuages forment une atmosphère autour du soleil ! Ces savoureuses naïvetés nous rappellent que les écrits de Copernic, établissant l’héliocentrisme, ont été mis à l’index par l’Eglise jusqu’en… 1835 !

Dans la Théogonie d’Hésiode, les Titans tentent de s’emparer du royaume céleste. La scène représentée ici est celle où Jupiter, muni de son foudre dans sa main droite et entouré d’autres Dieux de l’Olympe (tel que Mercure à droite de la composition), foudroie les Titans. A gauche du dieu courroucé se tient son aigle, symbole du lien entre le ciel et la terre. Au centre de la composition s’effondrent les Titans, dont Tiphon, qui est à l’origine du soulèvement.

Avec trois mille lithographies, des centaines d’aquarelles, plus de deux cents peintures, Josef Kriehuber fut le principal portraitiste de la Vienne Biedermeier. Toutes les personnalités viennoises ou de passage sont passées sous ses pinceaux : la haute aristocratie, les écrivains, les musiciens (Liszt, Schumann, Schubert, etc.) et bien sûr la famille impériale, à commencer par François-Joseph et l’impératrice Sissi.
