Imre Pán & Aurelie Nemours, Correspondances

Revue intitulée Les hors-textes de Morphèmes publiée par le poète, critique d'art et éditeur hongrois Imre Pan en 1965, contenant un poème et un collage original de l'artiste française Aurelie Nemours.
Aurelie Nemours, Imre Pan, Les hors-textes de MORPHÈMES, 1965, Cahier : 4 pp, 19,2 x 14,5 cm, Collage : papiers collés sur carton, 19 x 14 cm, signé, daté et numéroté VIII au dos, unique
Collage abstrait de l'artiste française Aurelie Nemours datant de 1965, réalisé partir de morceaux de papier noir, bleu et blanc découpés dans des journaux.
Aurelie Nemours, Sans titre (réalisé pour Les hors-textes de MORPHÈMES édité par Imre Pan), papiers collés sur carton, 19 x 14 cm, signé, daté et numéroté VIII au dos, unique
Collage abstrait de l'artiste française Aurelie Nemours datant de 1965, réalisé partir de morceaux de papier noir, jaune, blanc, rose et orange découpés dans des journaux.
Aurelie Nemours, Sans titre (réalisé pour Les hors-textes de MORPHÈMES édité par Imre Pan), 1965, papiers collés sur carton, 19 x 14 cm, signé, daté et numéroté II au dos, unique
Collage abstrait de l'artiste française Aurelie Nemours datant de 1968, réalisé partir de lettrages découpés dans du papier journal.
Aurelie Nemours, Sans titre, 1968, papiers collés sur carton, 19 x 14 cm, signé, daté et numéroté 7 au dos, unique
Sérigraphie abstraite de l'artiste française Aurelie Nemours datant de 1970, représentant un enchainement de carrés marron, orange, rouge et blanc autour d'un carré noir.
Aurelie Nemours, Sans titre, 1970-1971, sérigraphie, 16 x 12,5 cm, signée et numérotée 28/100
Sérigraphie abstraite de l'artiste française Aurelie Nemours datant de 1970, représentant un enchainement de carrés noir, bleu, rouge et jaune autour d'un carré blanc.
Aurelie Nemours, Sans titre, 1970-1971, sérigraphie, 16 x 12.5 cm, signé et numéroté 26/100

Les collages d’Aurelie Nemours sont une surprise. Visuelle. Plastique. Poétique. Pour qui s’est habitué.e, un peu distraitement, aux œuvres géométriques de la ligne – horizontale, verticale – et du point chez l’artiste, à son noir et à son blanc aussi rigoureux que sensuels, à ses aplats vibrant de couleurs monochromes, au vide profond, velouté, d’un infini répété qu’elle déploie de série en série, ses collages de 1965 et de 1968, réalisés à la demande d’Imre Pan pour les éditions qu’il conçoit de façon inlassable, entrecroisée, rhizomatique, fragmentée, et dont il reprend sans cesse l’intitulé (Signe, Signe Morphèmes, Signe L’art du dessin, L’estampe moderne, Morphèmes, Mini-Musée, Préverbes…), s’avèrent, à leur découverte, des ensembles d’une singulière unité et, surtout, un fructueux pas-de-côté de l’artiste.

Lorsqu’ils se sont dévoilés de leur papier de soie où ils étaient scrupuleusement mis à l’abri de la lumière naturelle, de la poussière longue du temps, des éventuelles déchirures ou pliures, lorsqu’ils se sont détachés de leur enveloppe de souple et mat papier cartonné vélin d’Arches qui les épouse à l’un des exemplaires de la revue Morphèmes, plus précisément le numéro 5 daté de 1965, et au poème « Équerre » de l’artiste, ce fut un miroitement éblouissant d’aplats larges ou en lanières découpées, de couleurs vives, entrecoupées, enchevêtrées, entrelacées, une modulation d’obliques, une ondulation de bleu, de vert, de rouge, de jaune, une danse ou plutôt une chorégraphie si peu austère de lettres typographiques jouant du fragment et du caché, venu d’un papier magazine ordinaire de la société moderne et consommatrice du début des années 1960 qui ouvraient à de nouvelles avant-gardes artistiques ne dédaignant pas redécouvrir la technique du collage et des papiers peints. Ainsi le Pop Art. Si les collages si originaux d’Aurelie Nemours sont une surprise, ou s’ils sont à chaque fois un étonnement, ils n’étaient pas des inconnus du travail de l’artiste de Rythme du millimètre ou Structure du silence… à tout le moins des oubliés que Serge Lemoine et Marianne Le Pomméré firent revenir au visible d’une exposition et d’un catalogue en 2001, au Musée de Grenoble, dans Aurelie Nemours. Pastels. Gouaches. Collages.

Mais l’oubli, encore, les menace, vingt ans après…

Les faire revenir, aujourd’hui, en 2023, dans la vitrine de la galerie Abraham & Wolff, dans une présentation discrète et modeste, attentive à la fois à ce qu’ils sont en tant qu’œuvre plastique unique et en tant que partie prenante d’une édition unissant poésie et forme visuelle, d’une édition qui dissout les frontières arbitraires entre le littéraire et les arts visuels, c’est faire revenir au jour l’un des exemples les plus riches et sensibles de collaboration entre un critique d’art poète et une artiste poète. Et par cette « association » qui se réalise sous le format de la publication éditoriale – le grand projet ou le grand œuvre d’Imre Pan dans ses années parisiennes –, Aurelie Nemours rejoint des artistes amies comme Marcelle Cahn, des artistes – dont sans nul doute elle est plus éloignée – soutenus et inlassablement exposés, montrés par Imre Pan depuis son installation à Paris, tels que Étienne Hadju, Victor Vasarely, Geneviève Asse, Corneille, Roberto Matta, André Marfaing, Christine Boumeester, René Bertholo, Sonia Delaunay, Jacques Doucet, Arpad Szenes, Ida Karskaya, et, un peu plus tard, Lourdes Castro, Milvia Maglione, Colette Brunschwig…

Imre Pan, qui crée, à partir de 1960, ces éditions de petit ou moyen format, à tirage limité, publiées sous forme de cahier imprimé composé d’un texte critique dont il est l’auteur ou d’un poème d’artiste comme pour Aurelie Nemours, et accompagnées d’une œuvre originale inédite (eau-forte, dessin, aquarelle, gouache, pastel, collage), s’inscrit dans la généalogie de ce synchrétisme des arts des premières avant-gardes de la modernité du début du XXe siècle. Pan le perpétue, le maintient, le renouvelle, le réactualise tout au long de cette décennie des années 1960 qui invente et s’interroge sur d’autres possibles d’usages des matériaux et de nouveaux langages formels où l’écrit et la lettre redessinent des surfaces, rythment des blancs et des espaces typographiés, où se déploie au sein de groupes artistiques expérimentaux, au Brésil, aux États-Unis, en France, en Italie, au Portugal, une poésie visuelle, concrète, sonore. Les collages d’Aurelie Nemours, s’ils s’ancrent dans la lignée cubiste de ceux de Kurt Schwitters, par exemple, ne peuvent pas ne pas être regardés à l’aune des nouvelles formes poétiques et musicales contemporaines, et de cette pratique renouvelée du collage.

Aurelie Nemours et Imre Pan se rencontrent en 1963. Leur collaboration s’étend tout au long de la décennie. Elle s’initie à travers la publication d’une poésie de l’artiste dans le premier numéro de la revue Morphèmes (janvier-février 1963) :

« L’herbe
Le souffle
Les vols voluptueux
Les trilles secrètes
Le chant
L’astre en filigrane pour matin
De Gloire
Insolite la vérité de ce martyr
Dans notre mémoire d’innocence »

Le second numéro de la revue (mars-avril 1963) – qui est accompagné d’une eau-forte de Geneviève Asse – accueille un nouveau poème d’Aurelie Nemours :

« La trace 

L’éclair

L’Instant
L’espace donné de charité

L’impondérabilité
La face »

En 1965 ou 1964, donc, Imre Pan invite Aurelie Nemours à réaliser un ensemble de vingt collages qui sont publiés dans le numéro 5 des Feuillets de Morphèmes ou Hors texte de Morphèmes daté de 1965. L’artiste compose un nouveau poème, « Équerre », sorte de réponse regard vers ces œuvres pour elle inédites dans sa pratique, et d’aucun.es s’accordent à considérer qu’elle y attacha peu d’importance. Faut-il écouter Aurelie Nemours ? L’unité et la singularité de l’ensemble, qui sera complétée en 1968 par la création d’une nouvelle série de vingt collages numérotés et signés, toujours à la demande d’Imre Pan, laissent à imaginer qu’il y a moins eu indifférence de la part d’Aurelie Nemours qu’expérimentation esthétique et méditative.

Les collages de 1968 n’ont jamais été publiés dans l’édition qui était probablement envisagée par Imre Pan. Ils se caractérisent également par une unité visuelle proche de la partition musicale fragmentée, l’artiste explorant davantage les torsions et les découpes du mot, de son unité-signe, la lettre. C’est sans doute dans l’insolite de ces collages restés esseulés de leur publication que se manifeste avec le plus de prégnance les échos d’une poésie concrète et sonore dans le silence même des écarts de blanc, dans les rythmes sinueux de coupes typographiques inattendues, et inventives d’une nouvelle plasticité du mot matière et de sa forme détachée.

Regarder les collages d’Aurelie Nemours, c’est mobiliser le mobile et le méditatif, le mouvement et l’énergie de l’espace ; c’est se tourner vers le contemporain du fragment et de la découpe, de la césure et de l’étale, particulièrement si l’on reste à l’écoute des pièces de 1968. Si la demande est : les collages d’Aurelie Nemours sont-ils des poèmes ? L’affirmatif est la réponse.

Marjorie Micucci, avril 2023

Laura Lamiel

Dessin à l'encre de chine noire de l'artiste française Laura Lamiel datant de 2012 représentant des cercles concentriques dessinés à l'aide de fines hachures
Laura Lamiel, 3 ans, 3 mois, 3 jours, 2012, encre de chine sur papier, 83 x 73 x 3 cm encadré, unique
Dessin à la mine de plomb et à l'encre rouge de l'artiste française Laura Lamiel datant de 2020 représentant deux mains jointes
Laura Lamiel, Territoires intimes, 2020, encre de chine, stylo, mine de plomb sur papier, 42 x 29,7 cm, 48 x 35,5 cm encadré, unique
Dessin à la mine de plomb et à l'encre rouge de l'artiste française Laura Lamiel datant de 2020 représentant des lèvres et une langue
Laura Lamiel, Territoires intimes, 2020, encre de chine, stylo, mine de plomb sur papier, 42 x 29,7 cm, 48 x 35,5 cm, encadré, unique
Dessin à la minette plomb et à l'encre rouge de l'artiste française Laura Lamiel datant de 2020 représentant deux mains
Laura Lamiel, Territoires intimes, 2020, encre de chine, stylo, mine de plomb sur papier, 42 x 29,7 cm, 48 x 35,5 cm encadré, unique

Essentiellement connue pour ses installations, Laura Lamiel (née en 1948) n’a eu de cesse d’entretenir une pratique du dessin tout au long de sa carrière. 

En 2018, le développement d’une installation intitulée Forclose fut l’occasion pour l’artiste d’élaborer des motifs dont elle décrit ainsi la production : « j’ai décidé de déplier cette pièce (Forclose) et j’ai commencé à réaliser des dessins qui ont pris leur autonomie. Je les ai réalisés, pendant plusieurs mois, tard dans la nuit. J’avais l’énergie, mais je devais attendre qu’elle arrive, il me fallait avoir le geste juste. Je prépare les encres et les papiers, puis arrive un moment de la nuit où c’est bon, je peux y aller, et cela peut durer deux ou trois heures. J’ai commencé à dessiner tout un vocabulaire de langues ; je me suis précipitée sur des feuilles de papier en les barbouillant (…), en ouvrant la bouche, en faisant sortir des têtes, des rhizomes, des plantes. » (Entretien avec François Piron, in LL, Paris, Paraguay Press, 2019). Poursuivie durant le confinement de 2020, cette série intitulée Territoires intimes se compose également de poumons, de mains ou de visages pris dans des entrelacs de traits. Bien qu’impulsif et empreint d’une violence que soulignent des encres rouges évoquant l’énergie du sang, l’ensemble dégage une impression de fragilité et de sérénité. 

Cette ascèse du travail, l’artiste l’avait déjà pratiquée auparavant, dans une série de grands dessins circulaires se présentant sous la forme de myriades de traits de plume rituellement alignés pour former des cercles concentriques. Ayant pour titre 3 ans, 3 mois, 3 jours, en référence à la durée traditionnelle de la retraite que doivent effectuer les aspirants lamas dans le bouddhisme thibétain, ces dessins s’apparentent à des exercices spirituels basés sur la répétition. Celui que nous exposons est ainsi composé par la répétition de la syllabe « om », en référence au mantra bouddhiste Om mani padme hum, dont les syllabes sacrées doivent conduire le récitant vers l’illumination. Il est accompagné de trois dessins de la série Territoires intimes

Ces œuvres de Laura Lamiel sont exposées en collaboration avec la galerie Marcelle Alix (Paris). 

Laura, Massimo, Sergio, Mario, Ludovico, 5 designers pour VENINI

Vue de l'exposition Venini à la galerie Abraham & Wolff
Vue de l’exposition
Mario Ticcò pour Venini, Boletus, 1970, verre, ensemble de 2 lampes : 56 x 30 cm la plus grande
Mario Ticcò pour Venini, Boletus, 1970, verre, ensemble de 2 lampes : 56 x 30 cm la plus grande
Sergio Asti pour Venini, Sans titre, 1970, verre, ensemble de 3 vases (32 x 25 cm pour le plus grand)
Massimo Vignelli et Laura Diaz de Santillana pour Venini, Tessuto, 1982, verre, ensemble de 2 lampes : 24 x 22 cm chacune
Ludovico Diaz de Santillana pour Venini, Grata, 1960, verre, métal, 70 x 20 cm

Après les créations d’Alfredo Barbini (1912-2007) et d’Ettore Sottsass (1917-2007), Abraham & Wolff est heureux d’exposer pour sa troisième collaboration avec la galerie Compasso (Milan) le travail de la verrerie d’art Venini.

Considéré comme l’une des figures emblématiques de l’art du verre du XXe siècle à Venise, Paolo Venini (1895-1959) est né à Milan où il se forme en droit. Il fonde en 1921 avec Giacomo Cappellin (1887-1968) une entreprise verrière à Murano. Les deux hommes se séparent quatre ans plus tard. Venini s’associe alors avec le sculpteur et designer Napoleone Martinuzzi (1892-1977). Sous la direction de Venini – lui-même concepteur d’objets en verre –, l’entreprise va révolutionner la verrerie artistique moderne grâce à une approche stylistique qui associe innovation, sensibilité aux exigences des marchés internationaux et maîtrise des techniques traditionnelles de production de Murano. Dès les années 20, les pièces issues des fourneaux de Venini se distinguent ainsi par le travail extrêmement détaillé des maitres verriers, une riche palette chromatique et un design très en avance sur son temps. Cette combinaison entre sophistication esthétique et savoir-faire séculaire ouvert à l’expérimentation va permettre à Venini de remporter un important succès critique et public. 

Au fil des décennies et des directions artistiques, Venini a poursuivi ses recherches stylistiques en s’attachant quelques-uns des meilleurs designers, artistes et d’architectes de son temps, parmi lesquels Gio Ponti (1891-1979), Carlo Scarpa (1906-1978), Fulvio Bianconi (1915-1996), Tyra Lundgren (1897-1979), Tapio Wirkkala (1915-1985) ou Timo Sarpaneva (1926-2006). Après la mort de Venini en 1959, la compagnie est demeurée fidèle à l’esprit de son fondateur, développant des collaborations fructueuses avec de nouveaux créateurs tels Ettore Sottsass (1917-2017) et Alessandro Mendini (1931-2019), mais aussi avec une nouvelle génération de designers et d’architectes internationaux comme Tadao Ando (né en 1941), Peter Marino (né en 1949) ou encore Ron Arad (né en 1951). 

Aujourd’hui les créations de Venini font notamment partie des collections permanentes du Metropolitan Museum (New York), du Cooper Hewitt, Smithsonian Design Museum (New York), du Museum of Modern Art (New York), de la Fondation Cartier (Paris) et du Victoria and Albert Museum (Londres). 

Abraham & Wolff expose une sélection de lampes et un vase nés de la collaboration de Venini avec les designers Sergio Asti (1926-2021), Ludovico et Laura Diaz de Santillana (1931-1989 et 1955-2019), Mario Ticcò et Massimo Vignelli (1931-2014).  

Miriam Cahn

Vue de l’exposition
Miriam Cahn, (schauen), dec. 1988, crayon sur papier, 30 x 120 cm
Miriam Cahn, ATMEN, 18.3.2013, scan, 4 éléments: 1/4: 19.5 x 28.5 cm, 2/4: 28.5 x 18 cm, 3/4: 27.5 x 20.5 cm, 4/4: 19 x 28.5 cm
Miriam Cahn, berlin mit fluss + durchsichtigen hügeln träumen, 11.4.06, crayon sur papier, 46 x 41 cm
Miriam Cahn, überlebender, 8.2.98, crayon sur papier, 30 x 21 cm
Miriam Cahn, o.t., 5.8.10, 2010, pastel à l’huile sur papier, 2 elements, l’ensemble : 24.5 x 71 cm, 1/2 : 24.5 x 32 cm
Miriam Cahn, o.t., 5.8.10, 2010, pastel à l’huile sur papier, 2 elements, l’ensemble : 24.5 x 71 cm, 1/2 : 24.5 x 32 cm
Miriam Cahn, beschuss, 28.12.08, graphite sur papier, 30 x 42 cm

En écho à l’exposition intitulée Ma pensée sérielle qui lui est consacrée du 17/02/2023 au 14/05/2023 au Palais de Tokyo, Abraham & Wolff met à l’honneur le travail de l’artiste suisse Miriam Cahn en exposant une sélection d’œuvres inédite ainsi qu’un de ses carnets de dessin datant de 1978.

Fleur dans un verre d’eau, personnage au regard sidéré, scène de bombardement, route serpentant entre des collines, série de visages fantomatiques ou scans témoignant du travail photographique et sculptural de l’artiste, cet ensemble donne à voir les multiples facettes d’une œuvre hantée par la violence sociopolitique, les images médiatiques et les problématiques féministes.

Jean-Marie Perdrix

Vue de l'exposition de Jean-Marie Perdrix regroupant un ensemble de sculptures en fonte de plastique issu de la série des Yabas, une sculpture en fonte de plastique coulée dans une peau de chèvre et une sculpture en fonte de fer
Vue de l’exposition de Jean-Marie Perdrix
Sculpture de l'artiste français Jean-Marie Perdrix réalisé au Burkina Faso en 2014 en fonte de déchets plastique coulée dans une peau de chèvre
Jean-Marie Perdrix, Sans titre, 2014, fonte de déchets plastiques, poils de chèvre, 18 x 28 x 25 cm
Ensemble de huit sculptures de l'artiste français Jean-Marie Perdrix intitulé Yabas, réalisé au Burkina Faso entre 2002 et 2017 en fonte de déchets plastiques
Jean-Marie Perdrix, Yabas, 2002 – 2017, fonte de déchets plastiques, ensemble de 8 sculptures, dimensions variable (88 x 36 x 12 cm chacun)
Sculpture de l'artiste français Jean-Marie Perdrix intitulée Votre paire, réalisée en 2017 au Burkina Faso à l'aide d'une peau de scrotum de zébu et d'un oeil de verre
Jean-Marie Perdrix, Votre paire, 2017, peau tannée, oeil de verre, 18 x 28 x 17 cm
Sculpture de l'artiste français Jean-Marie Perdrix intitulée Forme insaisissable, réalisée en 2017 avec de la fonte de fer
Jean-Marie Perdrix, Forme insaisissable, 1987 – 2017, fonte de fer, 61 x 17.5 x 6 cm

Artiste plasticien français, Jean-Marie Perdrix (né en 1966) a élaboré son œuvre loin du cadre institutionnel et marchand. Ses sculptures sont le fruit d’un lent processus contextuel fait d’une rencontre avec un lieu et ses spécificités humaines, sociales et économiques. Travaillant la fonte, le plastique et le bronze, l’artiste a mené de longues recherches sur les diverses techniques de fonderie qui l’ont conduit dans des ateliers et des usines en Géorgie, en Serbie, au Mexique, et surtout au Burkina Faso. Dans ce pays, à Koudougou, l’artiste s’est lié d’amitié avec des maitres bronziers avec lesquels il a notamment réalisé une impressionnante série de moulages à la chair perdue. Bustes de chiens, têtes d’ânes et de chevaux où la fonte de métaux vient se mêler aux ossements et au charbon, laissant en évidence les stigmates des transformations violentes par lesquelles est passée la matière.     

Sensibles à la question de la pollution en Afrique, Perdrix et ses collaborateurs burkinabés ont également mis au point une technique pour recycler et fondre les déchets des sachets plastiques. A partir de cette matière, l’artiste a notamment réalisé la série des Yabas (2002-2023), des moulages en plastique noir d’un authentique totem, avant de mettre en place – toujours en collaboration avec ses partenaires locaux – une activité pérenne de recyclage de ces déchets néfastes en mobilier scolaire. Les objets issus de cette production sont ainsi emblématiques d’une pratique qui noue sans didactisme les questions artistiques, sociales et politiques. 

L’œuvre de Jean-Marie Perdrix a été exposée à l’IAC en 2018 à l’occasion du projet Otium#3, à la Marian Goodman Galery (New York) en 2017, à la biennale d’art contemporain de Rennes en 2016, et à la Fondazione Giuliani (Rome) en 2013, à l’occasion de l’exposition The Promise of Melancholy and Ecology, curatée par Chris Sharp. 

Pour cette nouvelle exposition, Abraham & Wolff est heureux d’exposer une sélection d’œuvres qui comprend une sculpture moulée en fonte appartenant à la série des Formes insaisissables (1987 – 2017), une œuvre appartenant à une série intitulée Votre paire (2017), une sculpture appartenant à un ensemble de pièces élaborées à partir de plastique recyclé coulé dans des peaux de bête retournées, ainsi qu’un ensemble de huit Yabas.

Francisco Tropa et Oswald Oberhuber

Sculpture de l'artiste portugais Francisco Tropa intitulée Pantheon, se présentant sous la forme d'une boite noire dans laquelle reposent deux sculptures de poissons en résine blanche couchée sur un lit de papier découpée.
Francisco Tropa, Pantheon, 2021, 2 sculptures dans une boîte, 1/2 : 19 x 5 x 5 cm, 2/2 : 17,5 x 4 x 4 cm. Boîte : 8,5 x 26 x 13 cm, unique
Sculpture de l'artiste portugais Francisco Tropa intitulée Pantheon, se présentant sous la forme d'une boite noire dans laquelle reposent deux sculptures de poissons en résine blanche couchée sur un lit de papier découpée.
Francisco Tropa, Pantheon (2021), Carton gravé, livre déchiqueté, polyester thermoplastique (Ertalyte) signé et daté au dos du couvercle.
Sculpture de l'artiste portugais Francisco Tropa intitulée Pantheon, se présentant sous la forme d'une boite noire dans laquelle reposent deux sculptures de poissons en résine blanche couchée sur un lit de papier découpée.
Francisco Tropa, Pantheon, 2021, carton gravé, livre déchiqueté, polyester thermoplastique (Ertalyte) signé et daté au dos du couvercle
Vue depuis la vitrine de l'exposition Francisco Tropa & Oswald Oberhuber
Oswald Oberhuber, Stapel, 1990, et Francisco Tropa, Pantheon, 2021
Sculpture de l'artiste autrichien Oswald Oberhuber formée d'un empilement de boites en carton peint en blanc, gris et noir collé sur une caisse bois peinte en blanc et en gris.
Oswald Oberhuber, Stapel, 1990, boîte en bois, boîtes en carton ondulé, boîte en carton, carton ondulé coloré, dispersion, crayon, 105 × 56.5 × 45 cm
Sculptures de l'artiste portugais Francisco Tropa intitulées Pantheon, se présentant sous la forme d'une boite noire dans laquelle reposent deux sculptures de poissons en résine blanche couchée sur un lit de papier découpée.
Francisco Tropa, Pantheon, 2021

Francisco Tropa (né en 1968) est le créateur d’un univers à part se déployant à travers des installations complexes qui évoquent des thèmes comme le corps en mouvement, le temps, la mort, le jeu ou l’archéologie. Ces installations sont formées d’objets mystérieux que l’artiste élabore au carrefour de multiples références artistiques, historiques, littéraires ou philosophiques, qui alimentent une réflexion originale tournée vers les problématiques qui traversent l’histoire de la sculpture de l’Antiquité à nos jours. Joignant pensée conceptuelle et savoir-faire traditionnel, les créations de Francisco Tropa mettent en œuvre un large éventail de médiums et de techniques allant de l’horlogerie à la fonderie, du verre soufflé à la vidéo, en passant par la peinture et les divers procédés d’impression et de gravure.

Pour cette exposition, Abraham & Wolff propose, au côté d’une sculpture d’Oswald Oberhuber, ces objets constitués d’une boite noire contenant deux sculptures reposant sur un lit de papier découpé. Elles appartiennent à une série intitulée Pantheon, qui fut inspirée à Tropa par le célèbre Bouvard et Pécuchet de Flaubert. A partir du titre du roman, l’artiste a imaginé un jeu humoristique sur le nom des écrivains qu’il apprécie. James & JoyceGertrude & SteinRaymond & RousselLewis & CarrollWilliam & FalknerClarice & Lispector, chaque auteur de ce panthéon littéraire voit son patronyme changé en un couple de personnages incarnés par deux sculptures modernistes de sardines réalisées par tournage dans une résine ultrarésistante. Comme d’autres œuvres de Tropa, ces sardines s’offrent à la manipulation, à divers modes d’exposition. Elles peuvent demeurer couchées sur leur litière de papiers découpés dans les pages d’un livre, être extraites ensemble ou séparément afin d’être exposées debout, etc. Libre à l’utilisateur de s’en emparer. 

Oswald Oberhuber

Oswald Oberhuber, Gesprache, 1998, crayon sur papier, 55,4 × 41,8 cm encadré
Oswald Oberhuber, Stapel, 1990, boîte en bois, cartons ondulés, boîte en carton, carton ondulé coloré, dispersion, crayon, 105 × 56.5 × 45 cm
Oswald Oberhuber, Stapel, 1990, boîte en bois, cartons ondulés, boîte en carton, carton ondulé coloré, dispersion, crayon, 105 × 56.5 × 45 cm
Oswald Oberhuber, Stapel, 1990, boîte en bois, cartons ondulés, boîte en carton, carton ondulé coloré, dispersion, crayon, 105 × 56.5 × 45 cm
Oswald Oberhuber, Stapel, 1990, boîte en bois, cartons ondulés, boîte en carton, carton ondulé coloré, dispersion, crayon, 105 × 56.5 × 45 cm

Artiste autrichien, Oswald Oberhuber (1931-2020) trouve ses premières inspirations dans le mouvement d’après-guerre de l’art informel. Il réalise des sculptures en plâtre et en bronze qui interprètent en trois dimensions cette nouvelle peinture prônant l’expressivité de la matière et la spontanéité du geste. Empruntant à Léon Trotski le concept de « révolution permanente », l’artiste déclare en 1956 que l’absence de forme est la maxime générale de sa pratique artistique, ainsi qu’une attitude face à la vie. Il fait alors du « changement permanent » le mot d’ordre de sa négation des normes esthétiques et sociales. De cette manière, son œuvre rebelle s’ouvre à des transformations récurrentes tout au long de sa carrière, s’emparant de tous les mediums et passant d’un style à l’autre : conceptualisme, réalisme, peintures d’influence Pop, assemblage et collage, affiches politiques. En tant que galeriste et organisateur d’expositions, Oberhuber a mené plus de 600 projets, dont certains ont suscité d’importantes innovations dans l’art contemporain autrichien. Longtemps professeur et recteur de l’université des arts appliqués de Vienne, il a également exercé une influence sur les politiques culturelles et éducatives de son pays, façonnant les conduites artistiques de plusieurs générations. 

Oswald Oberhuber a représenté l’Autriche à la Biennale de Venise en 1972 et a participé à la Documenta 6 (1977), à la Documenta 7 (1982) et à la Biennale de São Paulo (1983). 

Pour ce nouvel accrochage, Abraham&Wolff expose en collaboration avec la galerie KOW (Berlin) une sculpture intitulée Stapel, et un dessin de nu qui témoignent de cette démarche libre et anarchiste. 

Isa Melsheimer et Alfredo Barbini

Dessin de l'artiste allemande Isa Melsheimer représentant un bâtiment moderniste et un personnage mi-homme mi-humain.
Isa Melsheimer, Nr188, 2007, gouache sur papier, 24 x 31,5 cm
Dessin de l'artiste allemande Isa Melsheimer représentant un bâtiment moderniste.
Isa Melsheimer, Nr330, 2013, gouache sur papier, 42 x 56 cm
Sculpture en céramique émaillée de l'artiste allemande Isa Melsheimer datant de 2019 représentant une forme bactérienne de couleur jaune et rose.
Isa Melsheimer, Bacteria 8, 2019, céramique, glaçage, 7 x 20 x 12 cm
Lampe en verre conçue par le designer italien Paolo Tilche en collaboration avec le maitre verrier de Murano Alfredo Barbini dans les années 1980.
Paolo Tilche pour Barbini, Cubico, 1980, verre soufflé et cristal, 24 x 23 x 23 cm
Vases en verre intitulés Cubico du maitre verrier de Murano Alfredo Barbini datant des années 1970.
Alfredo Barbini, Cubico, 1970, verre soufflé

L’artiste berlinoise Isa Melsheimer (née en 1968) élabore depuis plusieurs années une œuvre complexe qui met en question les interactions entre l’humanité et le monde végétal et animal, en explorant les expressions architecturales et environnementales de ces interactions. 

Puisant dans l’histoire de l’architecture et de l’urbanisme des références allant de l’utopie urbaine de Le Corbusier aux réflexions du mouvement métaboliste en passant par les constructions abandonnées, elle réalise notamment des sculptures qui mêlent béton, céramique et verre pour former des architectures miniatures où la matière inerte des matériaux de construction se trouve envahie, parasitée, phagocytée par des formes de vie primaires ou des végétaux qui semblent reprendre leur droit sur ces bâtiments. A la manière des récits de science-fiction qui inspirent également l’artiste, ces sculptures nous offrent une vision inquiétante de l’avenir où se pose la question de notre durabilité, de notre survie à l’ère du capitalisme et de la fin des utopies. 

Parallèlement à ce travail sculpté, Isa Melsheimer élabore des œuvres à base de textiles, des mondes botaniques s’épanouissant dans des boites en verre, mais aussi des dessins à la gouache qui poursuivent cette réflexion sur l’interaction métabolique entre nature et humanité. 

La vitrine de la galerie accueille une sélection de dessins représentant des édifices modernistes désertés, autour desquels errent parfois des animaux sauvages. Des représentations qui nous invitent à réfléchir sans didactisme sur notre rapport à l’espace habitable, la place que nous y occupons et celle que nous laissons au reste du vivant. Ils voisinent avec des céramiques emmaillées issues de la série Bacteria, petits objets ayant la forme de masses buboniques qui évoquent des organismes infectés par un virus.

Ces œuvres sont exposées au côté d’un ensemble de vases cubiques du maitre verrier Alfredo Barbini (1912-2007), technicien hors pair et designer inspiré, grande figure du Murano d’après-guerre, deux fois récompensé à la biennale de Venise pour ses sculptures en verre, ainsi que d’une lampe imaginée par le designer italien Paolo Tilche (1925-2003) à partir de ce vase cubique emblématique. Ces pièces de design sont proposées en collaboration avec la galerie Compasso de Milan. 

Laura Lamiel et Franz Erhard Walther

Vue de l'exposition des dessins de Laura Lamiel et de Elément n°7 de Franz Erhard Walther
Vue de l’exposition des dessins de Laura Lamiel et de Elément n°7 de Franz Erhard Walther
Dessin à l'encre de chine noire de l'artiste française Laura Lamiel datant de 2012 et représentant des cercles concentriques dessinés à l'aide de fines hachures
Laura Lamiel, 3 ans, 3 mois, 3 jours, 2012, encre de Chine sur papier, 104 x 84 x 3 cm (encadré)
Détail d’un dessin à l'encre de chine noire de l'artiste française Laura Lamiel représentant des cercles concentriques dessinés à l'aide de fines hachures
Laura Lamiel, 3 ans, 3 mois, 3 jours (détail), 2012, encre de Chine sur papier, 104 x 84 x 3 cm
Dessin à la mine de plomb et à l'encre rouge de l'artiste française Laura Lamiel datant de 2020 représentant une main
Laura Lamiel, Territoires intimes, 2021, encre de Chine, stylo, graphite sur papier, 42 x 29,7 cm,

Artiste française majeure, Laura Lamiel (née en 1948) a bâti au fil des décennies une identité artistique tout à fait singulière, nourrie par la psychanalyse et par une certaine cosmologie spirituelle. Après avoir consacré les premières années de sa réflexion plastique à la peinture, l’artiste a développé à partir des années 1990 des installations qui se présentent sous forme d’espaces délimités – les cellules – à l’intérieur desquels elle agence des meubles, des objets trouvés, des documents, des accessoires personnels. Elle crée ainsi des univers intimes et énigmatiques au seuil desquels le spectateur est invité à se tenir. Ce dispositif, Laura Lamiel n’a eu de cesse d’en explorer les possibilités. Aux espaces faits d’émail blanc et de surfaces métalliques immaculées sont venus s’ajouter des tables de travail, des cellules ouvertes dans le sol, des miroirs sans tain, des jeux de lumière toujours plus complexes, tandis que s’est amplifiée la charge biographique et affective des matériaux entrant dans la composition de ces installations.  

La galerie Abraham&Wolff propose d’explorer une autre facette de cette œuvre exigeante en exposant avec la collaboration de la galerie Marcelle Alix une série de dessins de l’artiste. Ces dessins, Laura Lamiel les décrit comme une expression spontanée trouvant son origine dans les éléments fondamentaux de son travail. Loin de constituer une pratique parallèle, ils font partie intégrante de certaines installations où ils sont mis en tension avec d’autres objets. Elle y élabore un vocabulaire impulsif constitué de langues, de rhizomes, de poumons, d’yeux ou de têtes qui expriment un certain rapport à la violence et à soi. 

En témoigne cette œuvre, représentant une main, réalisée à l’encre de chine rouge, issue de la série Territoires intimes. Elle sera exposée au côté d’un dessin plus conceptuel intitulé 3 ans, 3 mois, 3 jours, qui repose sur l’hypothèse d’un univers construit par des sons méditatifs. Deux approches représentatives d’une œuvre qui se veut sensible et mentale à la fois. 

Ces dessins seront mis en regard de l’Element n°7 de 1. Werksatz intitulé Feld und Teilung (Champ et Division), de l’artiste allemand Franz Erhard Walther (né en 1939).

Franz Erhard Walther

Photographie datant de 1958 représentant l'artiste allemand Franz Erhard Walther durant une performance où l'artiste crache de l'eau comme s'il était une fontaine vivante
Franz Erhard Walther, Versuch eine Skulptur zu sein, 1958 / tirage 2010, impression jet d’encre sur papier photo, 22 x 31,6 cm
Dessin protocolaire décrivant sous la forme d'un storyboard le protocole d'activation de l'élément n°7 de 1. Werksatz de l'artiste allemand Franz Erhard Walther.
Franz Erhard Walther, Nachzeichnung, 1971, crayon sur papier, 24,5 x 20 cm
Photographie en noir et blanc datant de 1965 représentant l'activation par deux utilisateurs de l'élément n°7 de 1. Werksatz de l'artiste allemand Franz Erhard Walther
Franz Erhard Walther, Feld und Teilung (Field and Division), Exemple, Single Element n°7 of 1. Werksatz, 1965
Élément n°7 de 1. Werksatz de l'artiste allemand Franz Erhard Walther, œuvre relationnelle  composée d'une pièce de toile noire et d'une corde portant le n°7
Franz Erhard Walther, Feld und Teilung (Field and Division), Single Element n°7 of 1. Werksatz, 1965, toile teintée cousue : 100 x 80 x 0,5 cm, corde : environ 100 m
Élément n°7 de 1. Wersatz de Franz Erhard Walther rangé dans sa pochette de protection en tissu blanc, autrement appelle lagerform
Franz Erhard Walther, Feld und Teilung (Field and Division), Single Element n°7 of 1. Werksatz, 1965, toile teintée cousue : 100 x 80 x 0,5 cm, corde : environ 100 m

Pour sa première exposition, Abraham & Wolff mettra en valeur le travail de l’artiste allemand Franz Erhard Walther (né en 1939). Créateur d’une œuvre fondamentale à la croisée du minimalisme et du conceptualisme, Walther a révolutionné l’approche traditionnelle de la sculpture en introduisant dans sa pratique une dimension participative.

Au début des années 60, alors qu’il cherchait à s’affranchir des matériaux traditionnels à disposition du sculpteur, l’artiste se tourna vers le tissu cousu suite à une visite du magasin de couture des parents de sa première épouse, Johanna Frieß. Élaborée entre 1963 et 1969 avec le concours de Johanna, son œuvre majeure, 1. Werksatz, est ainsi composée de 58 objets en tissu conçus pour être manipulés par des spectateurs devenus des utilisateurs.

De cet ensemble exceptionnel, Abraham & Wolff propose l’élément n°7, Feld und Teilung (Field and Division). Composé d’une pièce en tissu noir rembourrée et d’une corde mesurant approximativement 100 m de long, cet objet exige une utilisation en extérieur. À travers sa manipulation, ses deux utilisateurs sont invités à expérimenter de nouvelles interactions, de nouvelles sensations, à prendre conscience du temps et de l’espace dans lesquels s’inscrit l’activation, à établir en somme une autre forme de relation avec autrui et avec le monde réel.

Lorsqu’ils ne s’offrent pas au spectateur pour être manipulés, les éléments composant 1. Werksatz sont le plus souvent exposés sous leur forme stockée, leur lagerform, c’est à dire pliés et rangés dans une poche de protection dédiée. Exposé de la sorte, Feld und Teilung (Field and Division) se présente en tant qu’objet visible seulement. Il ne requière plus une activation physique mais une expérimentation mentale.

Fait rare, cette oeuvre est présentée en même temps qu’un « dessin opératoire » qui explicite son protocole d’activation sous forme de storyboard détaillé. Ces deux œuvres seront exposées au côté d’une photographie de l’artiste témoignant de ses premières réflexions sur l’oeuvre d’art pensée comme action.