Colette Brunschwig

Colette Brunschwig, Sans titre, 1973, acrylique et encre de Chine sur papier, 49,5 x 64,5 cm.
Colette Brunschwig, Sans titre, 2004 - 2011, encre de Chine et encre de couleur sur papier, 26 x 36 cm.
Colette Brunschwig, Sans titre, 2000, aquarelle et gouache sur papier, 23 x 31 cm.
Colette Brunschwig, Sans titre, 1950, encre de Chine sur papier, 19 x 28 cm
Colette Brunschwig, Sans titre, 1960, aquarelle sur papier, 15 x 21 cm.
Colette Brunschwig, Sans titre, 1995, aquarelle sur papier, 28 x 38 cm.
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Née au Havre en 1927, Colette Brunschwig est âgée d’une vingtaine d’année lorsqu’en 1945 elle s’installe à Paris pour étudier la peinture. Marquée par un conflit qu’elle a vécu dans la clandestinité et par le traumatisme de la Shoah, elle fait son apprentissage durant cet immédiat après-guerre qui s’apparente à un « an zéro » pour les artistes confrontés à l’ampleur de la catastrophe. Comme de nombreux intellectuels juifs survivants avec lesquels elle entretiendra des liens – Emmanuel Levinas dont elle suivra les séminaires, l’helléniste Jean Bollack qui fréquentera son atelier et avec qui elle correspondra, Paul Célan dont elle illustrera plus tard la poésie – Colette Brunschwig cherche alors à surmonter, à transcender l’anéantissement. 

Sensibilisée aux problématiques de l’abstraction par André Lhote (1885-1962), dont elle suit l’enseignement de 1946 à 1949, l’artiste trouve dans la peinture abstraite une voie possible et même une finalité logique, à savoir l’aboutissement des tendances à l’œuvre dans l’impressionnisme et le cubisme. Sa réflexion la conduit de Monet (1840-1926) à Malevitch (1879-1935), des Nymphéas au Carré blanc sur fond blanc, de la dissolution des formes à l’abolition totale de l’image et de toute représentation. A la fin des années 60, elle découvre la peinture de la Chine ancienne, les œuvres des peintres lettrés tels Wang Wei (701-761), Mi Fu (1051-1107) ou Shitao (1641-1719), dont elle admire le rapport fondamental à l’écriture ainsi que la conception esthétique et philosophique du vide (comprise non dans une opposition au plein mais dans une complémentarité entre la forme et l’informe). 

Liant ainsi métaphysique juive, abstraction moderne et pensée orientale du néant, l’œuvre de Colette Brunschwig occupe une place singulière dans l’avant-garde abstraite. Si l’artiste se sent d’abord proche de l’abstraction lyrique, attirée par la possibilité d’un art qui s’approche de l’écriture, de la production de signes, elle va refuser l’instantanéité du geste pour introduire dans son travail une dimension temporelle, un jeu de superpositions, d’accumulations et de reprises à travers lesquelles se dégage la forme. Chaque geste vient en couvrir ou en prolonger un autre. Hachures, traits, lavis, pochoirs s’additionnent par strates, donnant naissance à des profondeurs, à cette « troisième dimension » chère à l’artiste. Les techniques s’entremêlent : encre de chine, acrylique, aquarelle, gouache, huile. Des motifs récurrents émergent, s’effacent : cercles et rectangles structurant l’espace sans qu’il soit question de composition géométrique. Le tout dans une palette qui n’a jamais exclu la couleur mais lui a souvent préféré le noir et surtout le gris dans toutes ses nuances. 

Œuvre à part, en marge des autres courants. Mais pas isolée dans le siècle, comme en témoigne les compagnonnages qui lièrent l’artiste à Pierre Soulages (1919-2022), André Marfaing (1925-1987), Pierre Courtin (1921-2012), Árpád Szenes (1897-1985), Etienne Hajdu (1907-1996) ou encore Charles Maussion (1923-2010). Exposée pour la première fois en 1952 chez Colette Allendy, Colette Brunschwig a été accompagnée par plusieurs générations de galeries parisiennes tout au long de sa carrière, parmi lesquelles Nane Stern, La Roue, Clivages, Convergences et Jocelyn Wolff. 

Le cabinet de dessin d’Abraham & Wolff propose une sélection d’œuvres qui couvre une période allant de 1950 à 2012, donnant à saisir toute la constance et l’unité de son travail. 

  

Isa Melsheimer

Isa Melsheimer, n° 363 , 2015, gouache sur papier, 24 x 17 cm.
Isa Melsheimer, Nr 330 , 2013, gouache sur papier, signée et datée, au dos, 42 x 56 cm.
Isa Melsheimer, Nr 187 , 2007, gouache sur papier, 24 x 31,5 cm > 29 x 37 cm, encadré.
Isa Melsheimer, Nr 331 , 2013, gouache sur papier, signée et datée, au dos, 42 x 56 cm.
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Étroitement liée à l’histoire de l’architecture moderne, l’œuvre d’Isa Melsheimer (née en 1968) questionne depuis plusieurs années la vision idéologique de la nature et de l’existence humaine qui sous-tend les réalisations des architectes modernistes.

Prolongeant son important travail de céramiste, l’artiste réalise des gouaches qui mettent en scène des édifices dont les environs déserts voient parfois surgir des animaux sauvages et des silhouettes énigmatiques. Son iconographie puise dans les projets architecturaux de Claude Parent, Michael Graves, Carl Fingerhuth, Owen Luder ou encore Balkrishna Doshi, dont elle reproduit les constructions à partir d’images glanées dans des publications, des coupures de presse ou sur internet. Dessin après dessin, Melsheimer rend hommage aux audaces stylistiques de la modernité en même temps qu’elle en souligne les échecs à travers l’omniprésence du béton, matériau roi devenu symbole d’une architecture qui échoua dans sa quête du progrès. 

Ces images, l’artiste les émaille de références et de sous-entendus à l’histoire du modernisme mais aussi à la mode vestimentaire ou à la culture de masse. Elle élabore ainsi des représentations à la fois pessimistes et légères qui nous amènent à réfléchir sur notre rapport à l’espace habitable, la place que nous y occupons et celle que nous laissons au reste du vivant. Elle nous donne un aperçu d’un avenir inquiétant où nous semblons avoir disparu, victimes d’une ultime crise, et où ne reste, pour témoigner de notre passage, que des bâtiments dont les idéaux utopiques sont depuis longtemps révolus. 

            

Oswald Oberhuber

OSWALD OBERHUBER, Sans titre, 1986, Crayon sur papier, 42 x 55,8 cm.
OSWALD OBERHUBER, Sans titre, 1991, Aquarelle sur papier, 55,5 x 42 cm.
OSWALD OBERHUBER, Sans titre, 1989, Crayon sur papier, 36 x 47,7 cm.
OSWALD OBERHUBER, Sans titre, 1992, Crayon sur papier, 42 x 55,8 cm.
OSWALD OBERHUBER, Schnecken, 1989, crayon sur papier, 36 x 47,6 cm.
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Figure tutélaire de la scène artistique autrichienne, Oswald Oberhuber (1931-2020) trouve ses premières inspirations dans l’art informel de l’après-guerre dont il est l’un des cofondateurs en Autriche. Au tournant des années 50, il réalise ainsi des sculptures abstraites en plâtre et en bronze où prévalent l’expressivité de la matière et la spontanéité du geste. En 1956, l’artiste rompt avec ce travail et déclare que le « changement permanent » sera désormais le mot d’ordre de sa pratique artistique en même temps qu’une maxime de vie. Dès lors, dans un effort constant pour désapprendre et repartir à zéro, il n’aura de cesse d’engager son travail dans des transformations récurrentes, s’emparant de tous les mediums et passant d’un style à l’autre tout au long de sa carrière. Conceptualisme, réalisme, peintures d’influence Pop, assemblages et collages, affiches politiques, les idées se succèdent, l’artiste crée image sur image, objet sur objet, avec pour fil conducteur la négation des normes esthétiques et sociales.

Mais l’importance d’Oswald Oberhuber ne se mesure pas seulement à cette œuvre foisonnante et rebelle. Infatigable galeriste, organisateur d’expositions prolifique, il a mené plus de 600 projets, dont certains ont suscité d’importantes innovations dans l’art contemporain autrichien. En tant que professeur et recteur de l’Université des arts appliqués de Vienne, il a également exercé une influence notable sur les politiques culturelles et éducatives de son pays, façonnant les pratiques artistiques de plusieurs générations. 

La reconnaissance internationale d’Oberhuber s’est concrétisée par sa participation à la Biennale de Venise en 1972, à la Documenta 6 (1977) et à la Documenta 7 (1982), ainsi qu’à la Biennale de São Paulo en 1983.

Abraham & Wolff est heureux d’exposer en collaboration avec la galerie KOW de Berlin une sélection de dessins dont les inspirations et les styles très divers témoignent du tempérament libre de leur auteur. 

Laura Lamiel

Les yeux de W, 2021-22, Encre et crayon sur papier, 42 x 29,7 cm, unique.
Territoires intimes, 2020-22, Encre de Chine, stylo, rouge à lèvres, graphite sur papier Encre de Chine, stylo à bille, rouge à lèvres, graphite sur papier, 42 x 29,7 cm, unique.
Tête perdue, 2020, Encre de Chine, stylo, graphite sur papier, rouge à lèvres, 42 x 29,7 cm, 48 x 35,5 cm (encadré), unique.
Les yeux de W, 2020, Encre de Chine, stylo, graphite sur papier, 42 x 29,7 cm, 48 x 35,5 cm (encadré), unique.
Territoires intimes, 2020-22, Encre de Chine, stylo, rouge à lèvres, graphite sur papier, 42 x 29,7 cm, unique.
Territoires intimes, 2020-22, Encre de Chine, stylo, rouge à lèvres, graphite sur papier, 42 x 29,7 cm, unique.
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Si Laura Lamiel (née en 1948) est essentiellement connue pour ses installations poétiques prenant la forme d’espaces délimités à l’intérieur desquels des matériaux et des objets chargés de résonnances affectives sont agencés selon une logique énigmatique, elle n’a cessé d’entretenir une pratique du dessin tout au long de sa carrière. 

Certains d’entre eux ont récemment fait leur apparition au sein des installations de l’artiste, d’abord mis en tension avec d’autres objets, puis de manière plus indépendante. Le développement d’une pièce intitulée Forclose (2018) fut notamment l’occasion pour Laura Lamiel d’élaborer une série de motifs dont elle décrit ainsi la production : « j’ai décidé de déplier cette pièce (Forclose) et j’ai commencé à réaliser des dessins qui ont pris leur autonomie. Je les ai réalisés, pendant plusieurs mois, tard dans la nuit. J’avais l’énergie, mais je devais attendre qu’elle arrive, il me fallait avoir le geste juste. Je prépare les encres et les papiers, puis arrive un moment de la nuit où c’est bon, je peux y aller, et cela peut durer deux ou trois heures. J’ai commencé à dessiner tout un vocabulaire de langues ; je me suis précipitée sur des feuilles de papier en les barbouillant de rouge à lèvres, en ouvrant la bouche, en faisant sortir des têtes, des rhizomes, des plantes. » (Entretient avec François Piron, in LL, Paris, Paraguay Press, 2019). Il se dégage une certaine violence de cet ensemble impulsif également constitué de poumons, de mains, de visages pris dans des entrelacs de traits. Une violence qu’accentue l’usage systématique d’une encre rouge qui évoque l’énergie du sang. 

Cette ascèse du travail, l’artiste l’avait déjà pratiquée dans une série de grands dessins circulaires exposés en 2013 dans le cadre de l’exposition Ostinato, dessin, musique : interactions, à Namur. Ils se présentent sous la forme de myriades de traits de plume rituellement alignés pour former des cercles concentriques. Intitulés 3 ans, 3 mois, 3 jours, en référence à la durée traditionnelle de la retraite que doivent effectuer les aspirants lamas dans le bouddhisme thibétain, ces dessins s’apparentent à des exercices spirituels basés sur la répétition (telle la psalmodie récurrente des syllabes sacrées du mantra bouddhiste Om mani padme hum).

Une troisième série d’œuvres intitulée Les yeux de W montre des paires d’yeux émergeant d’un brouillard de hachures noires. Ces yeux que Laura Lamiel appelle des « yeux de chouette » s’inscrivent dans une recherche sur le thème du double, le W pouvant en effet être lu comme la lettre V accompagnée de son reflet symétrique – de même que les initiales de l’artistes, LL, peuvent évoquer cette question éminemment problématique du reflet et du double. Ils furent exposés dans des installations déployées en 2019 au CRAC de Sète, installations qui exploitaient les jeux de réflexions et d’occultation des miroirs sans tain. 

Ces dessins de Laura Lamiel sont exposés en collaboration avec la galerie Marcelle Alix (Paris). 

Katinka Bock

Katinka Bock, Gras (Wolke), 2011, monotype, peinture sur papier, signé au dos en bas à droite, 8 feuilles : 31,5 x 44 cm chacune, non encadrée unique.
Katinka Bock, Between arrival and departure, 2016, monotype sur papier, 66 x 50 cm, non encadré unique.
Katinka Bock, Gras (Wolke), 2011, monotype, peinture sur papier, signé au dos en bas à droite, 8 feuilles : 31,5 x 44 cm chacune, non encadrée unique.
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« Ce qu’on fait vient de la vie, l’art reste toujours dans la vie, c’est une contribution à la vie » – Katinka Bock

Artiste occupant une place importante sur l’échiquier international de l’art, Katinka Bock (née en 1976) vit et travaille aujourd’hui à Berlin et Paris. 

Utilisant une grande diversité de supports (sculptures, films, photographies, livres d’artistes, ou encore installations…), de matériaux (tels que l’argile, la pierre, le bois, le bronze, les végétaux, l’eau, etc.), et de techniques (plier, enrouler, mouler, marquer, faire une empreinte, trouver un équilibre, renverser…), Katinka Bock développe depuis le début des années 2000 une pratique artistique intimement liée aux questions d’espace, de temps et de matériaux.

Ses œuvres prennent forme dans un contexte architectural, urbain, social, temporel et environnemental qui les marque et qu’elles marquent en retour. Soucieuse de rendre perceptible la particularité des lieux dans lesquels elle intervient, l’œuvre n’est jamais pour Katinka Bock une finalité, mais un véhicule qui nous amène à faire l’expérience du temps et de l’espace. En concevant des œuvres en relation immédiates avec ces derniers, elle nous plonge alors, avec discrétion, au cœur d’un voyage intime et poétique, qui nous porte à travers l’histoire, les coutumes et les symboles d’un territoire. 

Miriam Cahn

Miriam Cahn, überlebender, 8.2.98, dessin sur papier, 30 x 21 cm.
Miriam Cahn, berlin mit fluss + durchsichtigen hügeln träumen, 11.4.06, crayon sur papier, 46 x 41 cm
Miriam Cahn, rufend, 19.02.1994, eau et pigments sur papier, 3 feuilles : 42 x 29.5 cm chacune
Miriam Cahn, mein atelier von innen + von aussen gedacht, 4.1.07, graphite sur papier, 25 x 34 cm
Miriam Cahn, junger soldat, 23.05.1995, charbon sur papier, 42 x 29,7 cm
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Inspirée par les luttes féministes et contestataires, l’œuvre de Miriam Cahn (née en 1949) puise son énergie dans la colère et l’indignation ressenties face à la violence et aux injustices. Guerre en ex-Yougoslavie, scandale d’Abou Ghraib, crise des réfugiés, inégalités entre les sexes, corps violentés des femmes à travers le monde, autant d’évènements et de réalités auxquels l’artiste se confronte en donnant naissance à des œuvres impulsives, véhémentes – peintures, dessins, photographies, créées selon un processus énergique qui engage tout son corps.   

Très personnelle, son iconographie est ainsi hantée par les thèmes du sexe, du pouvoir, de la violence, de la mort et leurs relations complexes. La représentation du corps conçu comme lieu d’exercice du pouvoir y occupe une place centrale. Ambigus, grotesques, fantomatiques, les corps représentés par Miriam Cahn arborent une nudité crue et sans concession. Ils nous fixent depuis la toile, nous sourient de manière inquiétante, exhibent leurs parties génitales, donnent ou reçoivent des coups, tous jetés dans des paysages schématiques, dans des situations indécises, dotés d’une présence irradiante et énigmatique. 

Si depuis plusieurs années Miriam Cahn a développé une pratique de la peinture à l’huile qui exploite tout le potentiel expressif de la couleur dans des œuvres monumentales, le dessin a toujours occupé une place centrale dans son travail, et ce dès les premières réalisations de l’artiste à la fin des années 70. Le cabinet de dessin accueille une sélection d’œuvres dont la production s’étale entre 1980 et 2019. On y retrouve cette même énergie qui habite les grands dessins réalisés à la craie noire sur des piliers d’autoroute en 1979, ce recours à des couleurs vibrantes et électriques si caractéristique de ses toiles aujourd’hui, des motifs récurrents tels que des visages au regard vide ou des actes sexuels prenant la forme de luttes violentes, des œuvres nées suite à un séjour qu’elle fit à Sarajevo au début des années 90, alors que la ville était encore assiégée, des tracés architecturaux, des paysages, des représentations dessinée au doigt qui évoquent l’art pariétal, mais aussi des polyptyques et des œuvres inattendues qui révèlent une facette peu connue du travail de Miriam Cahn.                          

Prinz Gholam

Prinz Gholam, Similitude (Rakes Progress), crayon de couleur sur papier, 122 x 86 cm, 2018.
Prinz Gholam, Similitude (Giandomenico Farewell), crayon de couleur sur papier, 122 x 86 cm, 2018.
Prinz Gholam, Similitude (Tetrarchy), crayon de couleur sur papier, 122 x 86 cm, 2018.
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Formé de Wolgang Prinz (né en 1969) et de Michel Gholam (né en 1963), le duo Prinz Gholam a développé au cours des 20 dernières années une pratique de la performance dans laquelle les deux artistes utilisent leur corps pour réinterpréter des références culturelles variées qui vont de la peinture ancienne à la sculpture en passant par l’art contemporain, le cinéma ou les images médiatiques. Ces stéréotypes culturels, les deux hommes les intériorisent et les incarnent à travers des chorégraphies précises durant lesquelles ils exécutent une succession de poses soigneusement choisies, se déplaçant tels des sculptures en mouvement.

Chacune de ces performances donne lieu à la création de vidéos, de photographies et de dessins. Ces derniers sont conçus comme des champs d’expérimentation qui participent à l’élaboration des performances tout en les prolongeant sous une autre forme.

Spécialement créée pour la Punta della Dogana à l’occasion de l’exposition collective « Dancing with myself  » (08/04 – 16/12/2018), la performance intitulée « Similitude » convoque plus ou moins directement des références historiques et artistiques puisées dans l’histoire vénitienne mais aussi dans l’exposition-même. Son développement fut accompagné par la création d’une série de grands dessins sur papier. Réalisés au crayon de couleur, ils montrent le duo dans diverses poses empruntées à des œuvres de Giandomenico Tiepolo et John Singer Sargent, au Rake’s Progress d’Igor Stravinsky ou bien à un bas-relief visible dans la basilique Saint-Marc. Les fragments chorégraphiques qui sont ainsi élaborés s’inscrivent dans des représentations de Venise et de la Punta della Dogana.

Franz Erhard Walther

Franz Erhard Walther, Werkzeichnung, 1967-1969, aquarelle, encre dactylographique, crayon de couleur, crayon sur papier, 215 x 295 cm, signé et daté en bas à gauche au recto et au verso.
Franz Erhard Walther, Werkzeichnung, 1968-1969, aquarelle, graphite, crayon, collage sur papier, 215 x 295 cm, signé et daté en bas à gauche au recto et au verso.
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Créateur d’une œuvre fondamentale à la croisée du minimalisme et du conceptualisme, Franz Erhard Walther a révolutionné l’approche traditionnelle de la sculpture en introduisant dans sa pratique une dimension participative. Élaborée entre 1963 et 1969, son œuvre majeure, 1. Werksatz, est composée de 58 objets en tissu conçus pour être manipulés par des spectateurs devenus des utilisateurs. A travers la manipulation de ces objets, les utilisateurs sont invités à expérimenter de nouvelles interactions, de nouvelles sensations, à prendre conscience du temps et de l’espace dans lesquels s’inscrit l’activation, à établir en somme une autre forme de relation avec autrui et avec le monde réel. 

Walther fut le premier utilisateur des pièces de 1. Werksatz, donc le premier à faire ces expériences. Cette confrontation avec son œuvre, l’artiste l’a documentée dans un ensemble crucial : les Werkzeichnungen (dessins de travail). Conçus à l’origine comme un journal privé, les Werkzeichnungen se présentent sous forme de diagrammes à deux faces à travers lesquels Walther consigne les expériences faites au cours de chaque activation (un dessin est de ce fait toujours lié à un objet spécifique). Pour retranscrire son ressenti, les effets produits par la manipulation, l’artiste a élaboré un langage à la fois pictural et scriptural qui se déploie sur l’envers et l’endroit de la feuille, les deux faces dialoguant entre elles. L’écriture occupe une place déterminante dans ce travail d’expression. Walther y invente en effet une terminologie qui est encore employée de nos jours pour décrire les œuvres. 

Chaque activation constituant un évènement unique, producteur de sensations spécifiques au lieu, au moment, aux partenaires, les Werkzeichnungen furent réitérés au fil des activations successives. Ils témoignent positivement de l’efficacité pratique du concept participatif à l’origine de 1. Werksatz, à savoir la possibilité pour chaque utilisateur de faire une expérience qui lui est propre. 

Rarement exposés d’abord, ces dessins furent peu à peu montrés au public pour devenir aujourd’hui indissociables des éléments de 1. Werksatz

Francisco Tropa

Francisco Tropa, Polynésie, 2010, eau-forte, 15 x 20 cm
Francisco Tropa, Le poumon et le coeur, 2020, sérigraphie sur papier, sable, tissu.
Francisco Tropa, Terra platónica, 2012, sérigraphie sur papier, 56 x 76 cm
Francisco Tropa, Herbes, 2009, Graphite sur papier, 45 x 33.5 cm
Francisco Tropa, Sans titre, 2014, Eau-forte sur Papier Velin d'arches (300gr) (monotype), 54 x 43 cm, unique.
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Francisco Tropa (né en 1968) est le créateur d’un univers à part se déployant à travers des installations complexes qui évoquent des thèmes comme le corps en mouvement, le temps, la mort, le jeu ou l’archéologie. Ces installations sont formées d’objets mystérieux que l’artiste élabore au carrefour de multiples références artistiques, historiques, littéraires ou philosophiques, qui alimentent une réflexion originale tournée vers les problématiques qui traversent l’histoire de la sculpture de l’Antiquité à nos jours. Joignant pensée conceptuelle et savoir-faire traditionnel, les créations de Francisco Tropa mettent en œuvre un large éventail de médiums et de techniques allant de l’horlogerie à la fonderie, du verre soufflé à la vidéo, en passant par la peinture et les divers procédés d’impression et de gravure. 

Le cabinet de dessin abrite des œuvres aussi diverses que des eaux-fortes abstraites, des frottages qui ne sont pas sans rappeler les expériences de Max Ernst (1891-1976), des dessins et des sérigraphies inspirés aussi bien par la cosmographie médiévale que par l’utopie architecturale de Paul Scheerbart (1863-1915), mais aussi des coffrets sérigraphiés. Autant de travaux qui témoignent d’une inspiration sans cesse renouvelée.

  

William Anastasi

Produit par Sam Jedig à l’occasion de l’exposition personnelle de William Anastasi à la Stalke Galleri, Copenhague, 2005.

William Anastasi (né en 1933) a bâti une œuvre fondamentale pour la formation de l’art conceptuel, tout en demeurant une figure à part de ce mouvement. De 1963 à nos jours, il a élaboré de multiples protocoles de dessins à l’aveugle : les Blind Drawings ou Unsighted Drawings. Aussi divers soient-ils, ces protocoles poursuivent un but unique : permettre à l’artiste de se soustraire à toute technique artistique, à toute référence esthétique et, si possible, à sa propre conscience.

Chacun de ces protocoles vise à automatiser plus ou moins rigoureusement le geste de l’artiste. En témoigne la série des Walking Drawings, qui compte parmi les premiers travaux de l’artiste dans ce domaine. Elle fut initiée à Philadelphie au début des années 60, avant qu’Anastasi ne déménage pour New York où il réside depuis. La réalisation de chaque Walking Drawing obéit au protocole suivant : dans une main l’artiste tient un bloc-note, dans l’autre un stylo, un feutre de couleur, un crayon, etc., dont la pointe est en contact avec le papier. L’artiste se rend en marchant vers une destination choisie puis revient à son point de départ sans regarder la feuille. Pareille à un sismographe, la main qui tient le stylo enregistre les mouvements du corps en marche pendant toute la durée du trajet. Fruit de ce seul mouvement, c’est à dire d’une énergie extérieure, le dessin obtenu n’est le reflet d’aucun préjugé esthétique, d’aucun projet conscient. Il n’illustre plus que son propre processus de création, ainsi que le temps et l’espace dans lesquels il fut exécuté.

Dans ses Burst Drawings, Anastasi trace des lignes en partant du centre d’une grande feuille de papier fixée au mur. Debout devant celle-ci, les yeux bandés, Anastasi tient un morceau de craie grasse dans son bras tendu et s’éloigne du centre. L’étirement de la ligne est limité à la portée de son bras et s’étend dans toutes les directions. La compression des lignes qui en résulte ressemble à une explosion.

La série des Blind Self Portraits est réalisée sans miroir, les yeux fermés, simplement de mémoire. Ces autoportraits à l’aveugle ne donnent accès à aucune intériorité, à aucune réalité. Ils n’expriment plus que le non-sens du hasard qui présida à leur création, la distance qui les sépare de leur modèle, débouchant ainsi sur une critique de la représentation. La nature automatique, répétitive, objective de ce procédé est ici mise en valeur par les nombreuses réitérations du dessin au crayon et au stylo.

William Anastasi, Resignation II, 1989, graphite sur toile, 190 x 359 x 4,5 cm, non encadré.
William Anastasi, Resignation II, 1989, graphite sur toile, 190 x 359 x 4,5 cm, non encadré.
William Anastasi, (Burst Drawing), 1989, graphite sur papier, 161 x 178.5 x 4.5 cm.
William Anastasi, Without Title (Walking Drawing), 10.12.10, 2010, graphite et encre sur papier, signé et daté en bas à droite et à gauche 19 x 28,5 cm, encadré 39 x 47,5 x 3 cm.
William Anastasi, Autoportrait aveugle, 2010, stylo à bille sur papier de riz, signé et daté en bas à droite, 32 x 21,5 cm.
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